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Biennale Internationale Design Saint-Etienne : « La cité contributive »

Dans le cadre de la Biennale Internationale du Design de Saint-Etienne, un colloque de trois jours questionnera la construction de la ville participative. Comment passer de la théorie à la pratique ? Quelles sont les conditions de la démocratie participative dans la gouvernance locale et dans la constitution de communs urbain ? Le but est de poser les bases concrètes de ce que pourrait être une ville portée par les habitants et les quartiers, et organisée en réseaux d’échanges.

Michel Bauwens participera à ce colloque le vendredi 12 avril à 14h avec le thème « Les communs urbains : l’évolution des modèles redistributifs vers des modèles « productifs » et cosmo-locaux ».

Fondateur et directeur de la Fondation P2P, Michel Bauwens travaille en collaboration avec un groupe mondial de chercheurs dans l’exploration de la production pair à pair, la gouvernance et la propriété. Il est également directeur de recherche de CommonsTransition.org, une plateforme d’élaboration de politiques visant une société des communs et membre fondateur du Commons stratégies Group, avec Silke Helfrich et David Bollier, organisateurs des grandes conférences mondiales sur les communs et l’économie.

Présentation du projet (pdf)

Programme complet (pdf)

Sookies, le biscuit anti-gaspi fait à partir de pain invendu

Une fois n’est pas coutume, nous soutenons un projet de financement participatif : l’ouverture d’un nouveau concept de café solidaire, éthique, eco-responsable et anti-gaspi au Mans dans la Sarthe.

Il s’agit d’un projet d’entrepreneuriat qui associe : anti-gaspi, solidaire, inclusion, économie circulaire et développement local avec un fonctionnement en P2P et en commun.
En 3 mois, plus de 13000 « Sookies » réalisé à base de pain invendu ont été vendus, et les biscuits sont distribués à 3 cantines scolaires proche du Mans. Les enfants disent que c’est « super bon ».

>> Pour soutenir le projet, cliquez ici…

Anoptikon. Une exploration de l’internet invisible

Olivier Auber

FYP éditons, 20 avril 2019

L’internet aurait pu être radicalement différent. Le monde aussi. Dans les années 1990, une autre forme de réseau a été expérimentée dans un relatif secret. Il aurait mis les humains en relation sans intermédiaire et sans vampiriser leurs données personnelles. Il n’aurait pas fabriqué les nouveaux empires que l’on connaît. Mais les opérateurs télécoms, les États et tous les pouvoirs ont rejeté ce réseau. Alors comme Galilée en son temps, les créateurs du NET ont dû se renier et renoncer à la promesse originelle d’émancipation, d’ouverture et de partage.

Trente ans après, le monde façonné par internet s’est enfermé dans un géocentrisme totalitaire. Le digital auquel nul ne peut prétendument échapper prédit que l’effondrement arrive, suivi au mieux de notre remplacement par des intelligences artificielles, au pire de notre extinction pure et simple. Nous ne pourrions que subir une sorte de darwinisme numérique.

Avec Anoptikon, Olivier Auber propose une tout autre perspective fondée sur ce qu’il appelle l’être en réseau qui augure une nouvelle relation entre l’homme et la technique. Plutôt que l’anéantissement qui nous est promis, c’est au contraire une nouvelle ère qui s’ouvre.

>> Lire la préface
>> Commander le livre

L’auteur

Olivier Auber est un artiste et un scientifique français connu pour l’invention d’un jeu en réseau appelé le Générateur poïétique (GP) — un modèle de l’interaction sociale —, et pour le concept de perspectives anoptiques. Il vit en Belgique où il est associé au centre de recherche interdisciplinaire Leo Apostel de la Vrije Universiteit Brussel (VUB).

Comment le Danemark convertit ses entreprises à l’open source

Un article de Jaime Arredondo publié le 11 mars 2019 sur le site de Ouishare sous licence Creative Commons BY-SA 2.0 France

Face à l’augmentation des salaires dans les pays occidentaux qui pousse à la délocalisation des activités industrielles vers les pays émergents, le Danemark a lancé le programme REMODEL pour aider ses entreprises nationales à créer des modèles économiques basés sur une logique open source. Une expérimentation a été lancé avec dix entreprises danoises Jaime Arredondo partage le retour d’expérience de ces pionniers.

En 2016 le Danish Design Center, un organisme du gouvernement danois, s’est concerté pour voir comment le Danemark pourrait positionner son industrie face au problème de l’outsourcing massif de sa production à l’étranger, avec la pression que cela implique pour le marché du travail. Comment répondre aux défis d’avoir un petit pays qui ne peut plus se permettre de fabriquer chez soi à cause des coûts salariaux trop élevés, mais qui a une culture du design extrêmement puissante? La réponse : aider les entreprises danoises à se développer avec des modèles open source qui permettent à n’importe qui d’étudier, de modifier, de réutiliser et même distribuer un produit comme le font déjà à différents degrés des entreprises tel que le fabricant automobile Tesla, Baidu le géant chinois qui développe des voitures autonomes ou Opendesk qui vend des meubles conçus par sa communauté de designers et fabriqués par les réseaux de fablabs.

Les modèles open source suscitent généralement autant de curiosité que de scepticisme et d’insécurité. C’est pourquoi, en 2018, le Danish Design Center a fait le pari de rassembler des exemples concrets et inspirants de succès open source internationaux, et de lancer le programme REMODEL pour aider des entreprises de produits à expérimenter et développer des modèles open source.

10 entreprises de fabrication ont été recruté pour tester le programme :

  • Thürmer, un fabricant historique de matériel de perçage industriel
  • Novozymes, fabricant d’enzymes industrielles et une des plus grandes entreprises danoises
  • Stykka, une plateforme digitale pour faire des meubles de bureau sur mesure
  • Ou Husum & Lindholm, des designers partenaires d’IKEA qui font des systèmes de jardinage urbain

Les entreprises ont utilisé le programme pour apprendre comment améliorer leur compétitivité, leur potentiel d’innovation et leur capacité à toucher de nouveaux marché de manière profitable grâce au principes de l’open source. À la fin du programme elles avaient clarifié les questions clés de leur stratégie.

  • Comment l’open source peut bénéficier l’entreprise ? Par exemple, est-ce que c’est développer et innover plus vite et moins cher, est-ce que c’est avoir une communauté qui aide à diffuser plus vite ou identifier des employés à fort potentiel dans la communauté…
  • Qu’est-ce qui peut être ouvert ? Le design, du software, du hardware, des datas ou des procédures…
  • Quelles sont les communautés qui pourraient contribuer au projet ?
  • Quelle va être la motivation de communautés externes à contribuer au développement de votre projet ? Est-ce que c’est parce qu’ils y gagnent une nouvelle technologie? Ou parce qu’ils gagnent en visibilité? Ou parce que ça leur permet de gagner de l’argent ?
  • Quels canaux de communication créer pour interagir et créer de la valeur avec ces communautés ?
  • Où est-ce que l’entreprise peut gagner de l’argent si elle ouvre sa propriété intellectuelle au monde extérieur ? Est-ce que c’est de la vente de produits physiques? Est-ce que c’est la création de projets sur mesure ou la maintenance? Est-ce que c’est la vente de briques additionnelles fermées pour les acteurs professionnels?

Deux résultats notables

À la fin de la première expérience il s’est passé deux choses remarquables. La première : sur 10 entreprises qui se sont portées volontaires, 8 ont décidé de faire le pas et de créer une vraie stratégie open source pour au moins un de leurs produits. Et la deuxième : toutes les entreprises ont témoigné que cette nouvelle stratégie leur rapporterait entre 130.000 et 1.300.000 € en CA additionnel dans les années qui viennent ou que ça a accéléré l’adoption d’une stratégie de développement et coopération qui leur aurait pris plusieurs années.
Voyons deux exemples.

Le premier, Novozymes, fabricant d’enzymes et micro-organismes à usage industriel, est conscient depuis longtemps qu’ils ne peuvent pas résoudre tous leurs problèmes tout seul. Un de leurs grands obstacles est de travailler dans une industrie où la protection agressive de la propriété intellectuelle empêche souvent l’ouverture.

Novozymes avaient déjà essayé de créer une plateforme de partage de connaissance, mais sans succès. Leur objectif en participant à REMODEL était donc de reconsidérer ce projet en profondeur et en intégrant toutes les parties prenantes de leur écosystème.

Le programme les a aidé à dépasser une compréhension unidirectionnelle de l’open source et comprendre comment cela pouvait s’appliquer à leur entreprise.

Le résultat de leur réflexion est une plateforme communautaire, Hello Science, qui permet de résoudre des challenges au moyen du partage de connaissance entre des acteurs académiques, des startups et des entreprises pour casser les silos de connaissances qui ralentissent l’innovation et la création de partenariats. Cette plateforme est un moyen unique pour eux de créer des connexions entre l’organisation et le monde extérieur qui peut, à terme, aider à résoudre des challenges qui touchent toute l’industrie.

Le deuxième exemple est l’entreprise de mobilier Stykka qui fournit à travers sa plateforme en ligne en mobilier sur mesure à de grandes entreprises comme Carlsberg, Ebay ou SAP.  Leur système de production intègre des blocs de construction qui permette de fabriquer des produits sur mesure de qualité à des prix de production de masses.

Même si Stykka avait depuis longtemps l’idée de créer une stratégie open source, l’idée restait intangible et difficile à mettre en œuvre opérationnellement.

Ils ont donc utilisé la méthode REMODEL pour explorer le potentiel de l’open source pour eux et voir concrètement à quoi pourrait ressembler une stratégie open source pour eux et comment est-ce que ça pourrait améliorer leur business.Le programme leur a permis de développer leur idée de façon à clarifier, concrétiser et ancrer les opportunités par rapport à leur business existant, comme permettre à des designers de s’emparer de leurs designs, mais de rendre en enrichissant et en rendant plus attractif le catalogue de meubles. En retour les designers, en plus d’avoir accès à des designs de qualité, peuvent aussi rendre leur travail plus visible et récupérer des royalties sur les meubles produits sur leurs designs.

Et après…

La méthode REMODEL est évidemment replicable et peut tout autant bénéficier des entreprises de fabrication en dehors du Danemark. Si vous êtes curieux et voulez développer votre propre stratégie open source, vous pouvez aller à Remodel.dk pour trouver les sprints compilés dans une boîte à outils, dont l’utilisation est ouverte à tous et disponible en Open Source. Et si vous avez d’envier explorer les possibilités de concevoir un modèle ouvert pour votre organisation avec un mentor, le 23 mai 2019 aura lieu une masterclass au Maif Startup Club avec Jaime Arredondo. Cliquez ici pour en savoir plus.

Photo d’Alexandre Godreau sur Unsplash

Quartier Libre, la librairie du 17e siècle 4.0

Quartier Libre est un « fab-lib »: un mélange entre la librairie du XVIIè siècle et celle du XXIème siècle qui publie, édite et vend des ouvrages culturels en un même endroit. Quartier Libre se veut être le cœur d’un écosystème éditorial permettant d’écrire, de publier, d’imprimer et de vendre ses ouvrages en un même endroit. C’est aussi un atelier de fabrication numérique avec des professionnels du print et du digital favorisant la création de media libres pour co-créer des émissions littéraires et diffuser des vidéos culturelles en streaming.

Vincent Demulière, l’entrepreneur derrière Quartier Libre vous en parle …

Comment est née l’aventure de votre entreprise sociale ?

Après de nombreuses années d’expérience en librairie, j’ai souhaité explorer le chemin du livre digital. Est née l’idée de créer une librairie au carrefour du livre, du digital, de l’écriture et de l’édition : la libraire du 17è siècle 4.0 !

Pour quelles raisons ?

Le livre perd du terrain dans les loisirs et les librairies ont manqué le passage au digital. Les GAFAM monopolisent les lecteurs avec une position dominante dans les offres digitales et Amazon prévoit d’ouvrir des centaines de librairies dans les années à venir.

En quoi votre entreprise sociale est une solution à ce problème ?

QL est un concept de librairie coopérative et innovante réunissant le print et le digital. Elle intervient à l’échelle locale en proposant des services professionnels de création et diffusion de contenus (livres, ebooks), un FabLab du li(v)re et un espace multimédia (podcasts, web-TV).

Concrètement quel est votre impact positif sur la société ?

Notre mission est de promouvoir la lecture, le livre et l’écriture pour chacun en soutenant l’écosystème éditorial : auteurs et artistes (en herbe ou professionnels), éditeurs ; de manière collaborative, interactive, créative et circulaire.

Vous aimez écrire, vous souhaitez découvrir le monde de l’édition, publier vos livres ; vous aimez lire et découvrir de nouveaux auteurs, vous aimeriez participer à des émissions littéraires ? Être acteur et spectateur ?
Quartier Libre, le lieu du li(v)re à Bruxelles, est fait pour vous !
Devenez coopérateur.trice à partir de 100€ et défiscalisez de vos impôts votre investissement.

Pourquoi investir chez QL ?

Le projet a un triple impact : sociétal, culturel et environnemental. QL a pour vocation de s’implanter dans son quartier pour développer l’économie locale. Par son modèle économique coopératif, QL place l’humain au centre : notre librairie n’est plus seulement un lieu de vente mais aussi un espace de production et de diffusion. L’impression du livre à la demande sur place permettra de réduire sensiblement notre empreinte carbone.

A travers la plateforme nous vous proposons de devenir actionnaire/coopérateur en investissant à partir de 100€ sous forme de parts sociales (capital). Quartier Libre étant éligible au Tax-shelter vous pouvez défiscaliser 18% si vous êtes français.e ou 45% si vous êtes belges ou résidents belges.
Vous pouvez également nous soutenir à hauteur de vos moyens en devenant bienfaiteur sur notre crowdfunding sur Kiss Kiss Bank Bank.

Voir aussi :

Les monnaies citoyennes renforcent les filières agricoles

par Antonin Calderon & Jean Rossiaud (Monnaie Léman/ APRES-GE,
en collaboration avec Gaëlle Bigler (FRACP / URGENCI)

Voici le troisième numéro de la série que nous avons entamée en octobre, sur le thème des « monnaies locales », après un exposé général des avantages et des défis des monnaies locales à travers l’exemple du Léman (octobre 2018) et des pistes de collaborations et des synergies entre monnaie locale et alimentation durable (décembre 2018), nous vous proposons aujourd’hui de réfléchir en termes de filière, pour différents type de produits agricoles, et en partant une nouvelle fois de l’expérience genevoise : de la semence à la production, de la production à la transformation, de la transformation à la distribution, de la distribution à la consommation. Les cinq filières agricoles clés sur lesquelles le Léman et la Chambre de l’Economie sociale et solidaire (APRES-GE) travaillent actuellement sont les suivantes :

La bière : du houblon à la pinte

Les légumes : de la fourche à la fourchette

Le pain : de la graine au pain

Le bois : de l’arbre au stère

Le vin : du pied au verre

Chaque filière présente ses particularités, et chaque acteur – chaque maillon de la filière – sa réalité et ses enjeux propres. C’est pourquoi il est particulièrement intéressant de rassembler les différents acteurs d’une filière autour de la même table, afin de réfléchir ensemble aux flux de valeur – et aux flux monétaires qui en découlent – actuels et potentiels. Nombreux sont les acteurs économiques qui n’ont généralement pas le temps de prendre ce recul. La monnaie locale offre aux producteurs une belle opportunité de renforcer les liens entre eux, et entre eux et les consommateurs, et ainsi de consolider l’économie locale, face à la concurrence des marchés globalisés. Le service apporté par la monnaie locale est la « facilitation économique » : c’est une forme de courtage qui permet aux producteurs de mieux choisir leurs fournisseurs locaux, et en cas de surproduction d’écouler les stocks dans la communauté de paiement.

Lire la suite de l’article sur le site du RIPESS…

L’alternative du commun

Sous la direction de LAVAL Christian, SAUVÊTRE Pierre, TAYLAN Ferhat

Editions Hermann, 27 Février 2019

Présentation

Ces dernières années, on observe dans les pratiques comme dans les réflexions théoriques une véritable « explosion » du thème du « commun », devenu une référence centrale pour de multiples foyers d’expérimentations politiques et économiques (mouvements altermondialistes et écologistes, défense des services publics, résistances paysannes, coopératives, expérimentations numériques collectives). Avec une vitesse rare pour une notion nouvelle, le commun s’est mondialement imposé en tant que grand concept politique de ce début de XXIe siècle. Il admet pourtant des acceptions fort différentes, parfois contradictoires. Cet ouvrage, issu d’un colloque de Cerisy, est consacré aux enquêtes et terrains permettant d’éclairer les enjeux théoriques, pratiques et historiques de ce concept, ainsi qu’aux propositions stratégiques qui en font aujourd’hui le principe de l’alternative au capitalisme.

Auteurs

Alain AMBROSI, Marie-Hélène BACQUÉ, Luca BASSO, Jean-François BISSONNETTE, Benoît BORRITS, Isabelle BRUNO, Claire CARRIOU, Philippe CHANIAL, Patrick CINGOLANI, Lorenzo COCCOLI, Alexis CUKIER, Anne D’ORAZIO, André DAL’BO DA COSTA, Pierre DARDOT, Léa EYNAUD, Daniela FESTA, Franck FISCHBACH, Haud GUEGUEN, Valerian GUILLIER, David HAMOU, Pauline JULIEN, Christian LAVAL, Claude LE GUOUIL, Mauve LÉTANG, Fabien LOCHER, Lionel MAUREL, Arnaud MÈGE, Francine MESTRUM, Massimiliano NICOLI, Nilton OTA, Hervé OULC’HEN, Ana Paula PACHECO, Luca PALTRINIERI, Véronica PECILLE, Franck POUPEAU, Judith REVEL, Grégory SALLE, Emine SARIKARTAL, Pierre SAUVÊTRE, Selma Cristina SILVA DE JESUS, Michele SPANO, Frédéric SULTAN, Ferhat TAYLAN, Delphine THIVET, Francis VERGNE

Vers une civilisation de la vie – Entreprendre et Coopérer

Olivier Frérot

Quelles initiatives sont prises aujourd’hui par des personnes, des collectifs dans les différents domaines de la vie sociale, conjuguant bien-être personnel et collectif, et respect de la planète ?

Comment ces initiatives dépassent-elles les blocages existants dans nos sociétés ?
Quelles valeurs émergent, permettant de comprendre et d’agir pour une civilisation de la Vie ?
Sur quelles démarches s’appuyer pour entreprendre, afin de garantir la construction d’une société neuve et vive

Cet ouvrage est un guide pour mieux comprendre les mutations sociales actuelles, pour identifier les valeurs en émergence et renforcer les initiatives porteuses de Vie.

Illustration: Annie Demongeot

Pour commander le livre, cliquez ici…

Découvrir l’Intelligence collective

Olivier Piazza

Dunod – Septembre 2018

Sujet «  tendance  » car stratégique et vitale pour les organisations, l’intelligence collective est le résultat des interactions multiples des membres d’une communauté. Elle vise à ce que la performance et la créativité de chacun soient démultipliées par l’action interactive avec les autres membres du groupe. Elle favorise l’accomplissement de tâches complexes par l’effet de synergie ainsi que l’innovation et la créativité.

Olivier Piazza est coach, facilitateur et enseignant. Co-Directeur des D.U. Executive Coaching, Intelligence Collective & Management Université de Cergy Pontoise.

Voir le livre sur le site de l’éditeur…

Mutualisons ! Un projet de coopérative d’alternatives à Bruxelles

Le projet « Mutualisons ! Samen bouwen » est un projet de recherche-action mené sur trois ans à Bruxelles, en Belgique. L’idée de ce projet est de comprendre et de tester des projets de mutualisation et de mise en commun entre acteurs bruxellois porteurs d’alternatives.

Son hypothèse principale est d’explorer la mutualisation pour favoriser une mise à l’échelle des alternatives bruxelloises ainsi qu’une amélioration de leur robustesse.

L’exploration théorique de cette hypothèse s’est faite principalement à partir d’une revue de littérature, puis a été complétée par un dialogue avec des ateliers de terrain.

La première étape théorique a consisté à tenter d’établir la définition d’une alternative. Sans parvenir à un consensus, le travail a néanmoins permis de déboucher sur un certain nombre de critères. Pour pouvoir être qualifié d’alternative, un projet doit donc :

  • proposer une transformation des structures de la société, une autre façon de remplir un besoin sociétal et avoir un lien avec l’idée de construire une autre société, plus durable et plus résiliente
  • avoir un caractère concret, c’est à dire être une expérimentation pratique de quelque chose de différent
  • avoir un caractère systémique plutôt collectif, avec une façon de faire nécessairement inclusive, participative, transparente
  • se faire en-dehors des institutions existantes et du système dominant, et se situer en dehors des flux de l’économie capitaliste

L’idée de mise à l’échelle vise à une amélioration qualitative et à une augmentation quantitative de l’impact social via des stratégies qui ont été identifiées et parmi lesquelles la coopération et la mise en commun vont être explorées dans la suite du projet.

Pour cela, durant une première phase d’exploration, une série de besoins récurrents ont été identifiés : un lieu, un soutien administratif, logistique, en en outils ou compétences (légales, communication,…), de la facilitation d’équipe, une meilleure connaissance des acteurs existants (cartographie et réseautage),… sont autant de pistes qui pourraient aider les différents collectifs à mieux fonctionner.

Les échanges ont permis de constater que nombre d’initiatives ont des ressources qui permettent de répondre aux besoins d’autres projets, même si tous ne sont pas couverts.

Les acteurs présents sont donc partants pour expérimenter une mise en commun à condition de respecter les valeurs et les spécificités de chaque alternative.

A partir de ce diagnostic des besoins, les expérimentations prévues sont les suivantes :

  • un cadre de coopération intégral inspiré de la coopérative intégrale catalane
  • quatre expériences de mutualisation concrètes qui consistent à créer :
    • un groupement d’employeurs
    • un système d’information et de communication libre et équitable (mutualisation de données)
    • un lieu commun et partagé
    • un système d’échanges économiques plus ouvert qui puisse permettre de ne pas faire un recours systématique à l’euro

Un comité de pilotage, sorte de gardien du projet chargé de valider les décisions stratégiques et de surveiller leur mise en œuvre, a été mis en place. Il est constitué de 15 alternatives représentatives d’un secteur et avec une expérience en matière de mutualisation. Les expérimentations ainsi identifiées et validées seront mises en oeuvre en 2019 pour être évaluées en 2020.

Journal de Culture & Démocratie

Le Journal de Culture & Démocratie n°48 s’intéresse à la question du travail.

Le travail définit beaucoup plus que nous ne le pensons notre itinéraire de vie et ce dossier explore ce que travailler veut/devrait dire. Il propose des repères théoriques et expérientiels, des perspectives et du recul pour échapper à la pression univoque du fameux « jobs, jobs, jobs » !

La table des matières s’ouvre notamment avec une analyse des liens rarement explicités, entre travail et démocratie. Suivent une réflexion sur les relations entre travail et numérique, des retours d’expériences sur d’autres formes d’organisation du travail, des approches critiques sur le rôle des artistes dans la recherche-action, des restitutions de regards artistiques sur l’univers du travail, un point de vue de syndicaliste différent de ceux que relaient à l’envi les médias grand public, une sélection de films pour mieux voir ce qui se joue dans les usines et les entreprises, bref, un voyage multiple au coeur des interrogations et des réinventions à l’oeuvre aujourd’hui dans le champ du travail.

On trouve notamment au sommaire de ce numéro un article intitulé « Ce que fait l’économie collaborative au travail. Entretien avec Michel Bauwens | Propos recueillis par Irene Favero » :

Si vous deviez expliquer à un enfant ce qu’est le pair à pair, qu’est-ce que vous lui diriez ?

Je lui dirais que c’est ce qu’il peut faire dans sa classe, c’est-à-dire parler à tout le monde sans demander la permission, et s’imaginer qu’il peut faire ça avec tous les habitants de la terre. Le P2P, c’est cette capacité de pouvoir parler à tout le monde pour faire des choses ensemble et s’organiser. Aujourd’hui, plutôt que de le faire uniquement avec des gens qui sont près de chez nous, grâce aux nouvelles technologies, nous pouvons le faire dans le monde entier. Avant, quand on s’adressait à une masse, on était obligé de passer par une hiérarchie. Aujourd’hui nous avons des moyens technologiques pour s’auto-organiser dans le monde entier selon des intérêts communs et le désir de créer et partager de la valeur ensemble.

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Les communs: le modèle de “l’après” capitalisme libéral

Avec l’aimable autorisation de Myriam Bouré d’Open Food France, nous reproduisons ici son article sous licence  CC BY-NC 4.0

Comme le rappelle Nicolas Hulot à l’annonce de sa démission du gouvernement, difficile de combiner capitalisme libéral et écologie. Le modèle des communs ne serait-il pas le modèle d’avenir, post capitalisme libéral, conjuguant performance économique, sociale et environnementale ? Décryptage, en s’appuyant notamment sur l’exemple d’Open Food Network.

Le rang des supporters des communs ne cesse de s’agrandir. Gael Giraud directeur de l’Agence Français du Développement en a même fait un des axes primordiaux de la stratégie de l’AFD. Alors comment les communs vont-ils renverser le capitalisme libéral ?

Pour répondre à cette question, je vous propose ici quelques pistes de réflexion s’appuyant sur des exemples concrets issus de ma propre expérience, mais qui mériteraient d’être étayés par une analyse plus exhaustive.

Le rang des supporters des communs ne cesse de s’agrandir. Gael Giraud directeur de l’Agence Français du Développement en a même fait un des axes primordiaux de la stratégie de l’AFD. Alors comment les communs vont-ils renverser le capitalisme libéral ?

Pour répondre à cette question, je vous propose ici quelques pistes de réflexion s’appuyant sur des exemples concrets issus de ma propre expérience, mais qui mériteraient d’être étayés par une analyse plus exhaustive.

1- Performance économique : de nouvelles possibilités d’économies d’échelles

1.1- L’exemple d’Open Food Network : mutualisation de ressources à large échelle

Prenons l’exemple du logiciel open source Open Food Network. Ce logiciel est porté par une communauté d’individus dans le monde entier, qui collaborent à son développement. Le code est sous licence libre, AGPL, signifiant qu’au delà de cette communauté, tout autre personne morale ou physique peut utiliser ce code et construire dessus, à condition que ces développements soient aussi partagés sous la même licence, créant ainsi un “effet d’abondance démultiplicateur”.

Le logiciel a pour objectif d’encapaciter les opérateurs de circuits courts alimentaires, d’une manière non prescriptive, et ainsi, de permettre à ces opérateurs de se démultiplier, d’essaimer, de gagner en efficacité sur leur gestion, de se développer pour atteindre la taille critique qui leur permet d’être pérenne, etc. Sans imposer un modèle de distribution spécifique (AMAP, “ruches”, groupements d’achat, etc.) le logiciel se veut assez flexible pour permettre à tous ces différents acteurs d’en bénéficier.

En terme de fonctionnalités, 90% des besoins de ces opérateurs de circuits courts sont grosso modo les mêmes, quel que soit le modèle de fonctionnement de l’opérateur, et dans tous les pays du monde. Fort de ce constat, l’idée des commoners revient à dire : développons en commun un outil de gestion, et partageons-en l’usage ! Cela signifie: division du coût de développement par un nombre important d’utilisateurs de la fonctionnalité.

1.2- Quel est le niveau de mutualisation pertinent ?

Le projet Open Food Network s’organise selon un principe de subsidiarité: la mutualisation, et les décisions afférentes, est opérée à l’échelle la plus adaptée selon la nature du commun.

Il y a donc dans Open Food Network 3 “niveaux de communs” gouvernés par 3 communautés :

  • Communauté des affiliés nationaux/régionaux (en bleu) : gouverne en commun le logiciel libre OFN
  • Communauté des hubs alimentaires d’un pays / d’une région (en vert) : gouverne en commun l’affilié national/régional = entité “coopérative” qui déploie et offre en accès SaaS le logiciel OFN
  • Communauté des producteurs et acheteurs (mangeurs finaux, restaurateurs, etc. En jaune.) : gouverne en commun le hub alimentaire local

Cette organisation permet de conserver la gouvernance adaptée à la ressource gérée “en commun”, donc la souveraineté des utilisateurs de la ressources, mais aussi d’optimiser la gestion et le financement nécessaire pour la préservation et le développement de cette ressource.

2- Performance sociale : un renouveau démocratique

On pourrait définir un commun comme “une ressource matérielle ou immatérielle gérée par une communauté qui en partage l’usage”.

Tout est commun.

Exemples :
– Une cage d’escalier, ou le bâtit d’un immeuble, est un commun pour la communauté des habitants de l’immeuble.
– L’air, les océans, les forêts (poumon de la planète) sont des communs de la communauté des êtres vivants de la planète.
– L’eau d’un fleuve est un commun de l’ensemble des êtres vivants depuis sa source jusqu’à l’estuaire.
– Les ressources du sous-sol de la terre sont un commun de l’ensemble des habitants de la planète.
– Une bibliothèque, un parc, les trottoirs et routes d’un quartier sont des communs pour l’ensemble des habitants du quartier.
– Un marché ou une épicerie est un commun pour les producteurs, travailleurs et acheteurs de ces circuits de distribution.
– …

Bien sûr, il n’est pas rare que ces communs soient “accaparés” par un acteur souhaitant en tirer profit, et soumettre les communautés qui en dépendent à ses propres règles. Ou simplement, par effet rebond du système capitaliste dans lequel nous sommes, empreint par la culture de ce système, nous ne savons comment faire autrement, quels modèles économiques construire autre que ceux du capitalisme libéral.

En basant la gouvernance de ces communs sur l’inclusion de l’ensemble des parties prenantes de ces communautés, et en utilisant des méthodes de facilitation permettant réellement de faire émerger l’intelligence collective, il n’y a plus de laissés-pour-compte, plus de déséquilibres dans le partage de la valeur.

On peut citer l’exemple d’Alterconso à Lyon, SCIC composée de 50 producteurs, 800 familles et 6 salariés. Ils organisent la distribution de 7 types de paniers (légumes, viande, produits laitiers, pain, etc.) via 14 points de retraits à Lyon. Avec un système de tarification sociale où ceux qui gagnent peu paient 0% de commission, et ceux qui gagnent plus 20%. Où les producteurs contribuent via une commission de 12 à17% selon le service logistique que leur apporte la coopérative, donc selon leur “utilisation du commun”. Les salariés, les producteurs, reçoivent un salaire digne pour leur travail. Les consommateurs ont accès à des produits sains, biologiques, quel que soit leur niveau de revenus. Voilà la puissance du commun. L’intelligence collective qui invente un modèle prenant en compte les contraintes de chacun, respectant chaque individu.

3- Performance environnementale : qui dit mutualisation dit moindre pression sur les ressources

Prenons un exemple pour illustrer : le cas de la logistique des circuits courts. Aujourd’hui, chaque groupement d’achat, chaque AMAP, chaque “ruche”, chaque coopérative locale, va dans la grande majorité des cas organiser sa logistique dans son coin.

Dans beaucoup de cas même, comme pour les AMAP ou nombre de groupements d’achat, chaque producteur va se déplacer jusqu’au point de retrait de l’AMAP, ou le lieu de dépôt du groupement d’achat. Aller: camionnette à moitié pleine. Retour: camionnette vide. Les producteurs font parfois plusieurs heures de route pour livrer les points de distribution, notamment lorsqu’ils livrent dans les grandes villes, et passent parfois une journée entière à faire les livraisons. Tout cela n’est pas performant, ni économiquement, ni environnementalement, ni socialement. Avec une telle logistique, difficile aussi pour ces modèles de “passer à l’échelle” et devenir le modèle dominant.

Alors imaginez : si l’on construisait, avec l’ensemble des acteurs des circuits courts, un service logistique en commun, utilisant leurs données pour construire à chaque instant les routes les plus optimisées prenant en compte l’ensemble des acteurs de l’écosystème. Fini les silos donc! Tous ces acteurs indépendants, distribués sur les territoires, pourraient décider de mutualiser leurs données de flux prévus pour, via l’analyse de ces “mégadonnées” (“big data” pour les anglicistes) construire ensemble un service logistique en commun. Cette vision n’est pas juste un rêve, nous avons posé les premiers pas via l’initiative Data Food Consortium.

Plus simplement: acheter en commun et partager l’usage d’une voiture, organisée par la coopérative Citiz, ça veut dire produire moins de voitures donc moins de pression sur les ressources. Acheter en commun des Fairphones via la coopérative Commown et les louer, assurant ainsi leur réparation et durabilité maximum, c’est limiter la pression sur les ressources. Se fédérer à plus de 15000 sociétaires autour de la coopérative Enercoop qui organise la distribution d’électricité 100% renouvelable, c’est organiser ensemble, en commun, la sortie du nucléaire et du charbon.

Les communs : un moyen de réconcilier capitalisme libéral et écologie?

Les “commoners” sont des libéraux. Ils défendent la liberté et l’initiative individuelle. Mais ce sont des libéraux pragmatiques. Ils ont compris qu’ils doivent coopérer pour organiser des systèmes performants :

  • dont ils gardent la souveraineté,
  • qui leur permettent de satisfaire leurs besoins,
  • et assurent la préservation des ressources dont ils dépendent sur le long terme.

Faire ensemble. Faire communauté. Les commoners sont les entrepreneurs qui inventent le post-capitalisme.

Les commoners ne jettent pas le bébé capitalisme avec l’eau du bain. Ils inventent un nouveau/post capitalisme, un capitalisme “citoyen” où la propriété d’une entreprise n’est plus dans les mains d’investisseurs cherchant à maximiser leur retour sur investissement, mais dans les mains de citoyens souhaitant être souverains des systèmes dont ils dépendent et finançant de façon collaborative ce commun. Dans ce nouveau capitalisme, le retour sur investissement ne se mesure pas seulement sur la performance financière (atteinte de l’équilibre financier), mais aussi sur les performances sociales et environnementales, comme le propose par exemple la comptabilité en triple capital. Selon les modèles de communs, ils peuvent même abroger la propriété et vont alors au-delà du capitalisme : certains communs, les biens communs mondiaux, appartiennent à tout le monde, comme l’air par exemple.

Les commoners sont pour la croit-sens. Faire grandir le sens. Mais pas la croissance sans limite, car cette croissance infinie déconnecte les usagers de la gouvernance des systèmes.

Alors, les communs ne seraient-ils pas le modèle le plus prometteur pour remplacer le modèle du capitalisme libéral qui conduit l’humanité à sa perte?

Voyage pour Terreland

Paul Raskin

Traduction de Olivier Petitjean

Tellus institute 2018

Nous sommes entrés dans la Phase planétaire de la civilisation. Des liens d’interdépendance se sont tissés entre l’humanité et la Terre, jusqu’à former une seule communauté de destin : ce proto-pays surplombant appelé ici Terrelande. En ce XXIe siècle tourmenté, le drame de l’évolution sociale va se jouer sur une scène mondiale, face à de nombreux périls, qui pourraient donner raison à ceux qui présagent un avenir des plus sombres. Et pourtant, une Grande transition vers une civilisation planétaire où nous mènerions des vies plus riches dans un environnement sain est encore possible. Mais comment ? Quelles formes de conscience et d’action collective peuvent-elles nous réorienter vers un tel avenir ? Qui mènera la marche ? À quoi pourrait ressembler ce nouveau monde ? Voyage pour Terrelande propose des réponses, en expliquant le moment de l’histoire du monde dans lequel nous nous trouvons et les défi s qu’il implique, en soulignant le rôle déterminant que devra jouer un mouvement citoyen mondial pour faire advenir les transformations nécessaires, et en esquissant la civilisation florissante qui pourrait nous attendre de l’autre côté de la Grande transition. Nous sommes à un tournant : notre odyssée vers un monde différent a déjà commencé, mais la destination fi nale dépend de choix et de luttes encore à venir. Avant tout, nous devons commencer par empêcher d’advenir les futurs terrifi ants que nous craignons. Mais notre véritable tâche est de faire naître cette Terrelande plus belle que nous et nos descendants méritons.

Lire le livre (PDF)

Vers une république des biens communs

Ouvrage coordonné par Nicole Alix, Jean-Louis Bancel, Benjamin Coriat, Frédéric Sultan

Les liens qui libèrent : 29/08/2018

Des jardins partagés aux logiciels libres, des encyclopédies en ligne aux recycleries installées dans les quartiers des villes ou dans les campagnes, les «communs» semblent essaimer partout. Mais pourquoi ce succès ? Et comment expliquer cet essor ?

Cet ouvrage montre comment nous sommes entrés dans une phase nouvelle, celle de l’enracinement des communs dans la société, de leur extension à des domaines sans cesse élargis de la vie sociale et de leur pérennisation dans le temps. Car les auteurs partagent cette conviction : le commun n’est pas destiné à venir compenser les déficiences d’un monde capitaliste et marchand. Instrument d’une citoyenneté refondée, le commun comme les hybrides auxquels il ne peut manquer de donner lieu (mutuelles de travail, coopératives «ouvertes», plateformes numériques, etc.) ont vocation à se déployer comme formes économiques majeures, au service du bien commun.

En tirant parti de l’expérience mutualiste, coopérative et associative, ce livre s’efforce de penser dès aujourd’hui la connexion et la coopération entre communs pour aider à ce que cet avenir se réalise. Si l’on veut échapper à l’enfermement des communs dans un monde fait d’îlots séparés, il faut d’emblée envisager les relations des communs à l’entreprise, à la ville, au territoire, à l’action citoyenne, et commencer à préfigurer et à anticiper dans la pensée comme dans l’action ce que pourrait être une république des communs.

L’ouvrage collectif contient un chapitre intitulé « Comment créer une véritable économie du commun ?« , co-écrit par Michel Bauwens et Maïa Dereva de la P2P Foundation.

La problématique des « communs » en France

Pérez (Roland)Zimnovitch (Henri)

Type de publication: Article de revue

Revue: Entreprise & Société 2018 – 1, n° 3 varia

Résumé: La présente note vise à présenter l’importance prise par la problématique en termes de « communs » ces dernières années en France et, plus particulièrement, le rôle qu’a joué, à cet égard, les travaux d’Elinor Ostrom. Dans ce même numéro sont présentées trois recensions d’ouvrages représentatifs de la vitalité actuelle de la thématique des communs.

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L’Atelier Paysan : un bilan impressionnant, une croissance exponentielle, et toujours autant de projets

Depuis 2009, ce collectif de paysan⋅ne⋅s, de salarié⋅e⋅s et de structures citoyennes et du développement agricole développe une démarche innovante de réappropriation de savoirs paysans et d’autonomisation dans le domaine des agroéquipements adaptés à l’agriculture biologique.

Fabrice CLERC est co-gérant de l’Atelier Paysan. Il a bien voulu répondre aux questions de Michel Bauwens pour faire le point sur le développement du collectif et sur ses projets.

L’évolution de l’Atelier Paysan : comment passer un cap de croissance ?

Notre structure est jeune, elle a connu un développement significatif ces dernières années qui s’est accompagné d’ajustements nécessaires mais qui ne suffisent plus. Nous avons  dépassé le stade de l’artisanat. Aujourd’hui, nous avons pris conscience de manière aiguë que nous étions arrivés à une limite logistique, humaine et économique de notre organisation. Il nous faut travailler à l’Atelier Paysan de demain. Nous ne pouvons pas continuer à fonctionner comme nous le faisions jusqu’à présent.

Il y a cinq ans, nous avons investi dans notre mobilité (fourgons mobiles avec des remorques) pour tenir des formations, des sessions de prototypages, etc… (soixante à quatre-vingt déplacements par an). Nos camions sont maintenant épuisés, nous n’avons pas de transpalette pour les charger et les décharger (car il n’y a pas de cour bétonnée devant les locaux). Tout se fait à la main, nos colis se réalisent dans notre cage d’escalier, il n’y a pas l’ergonomie nécessaire pour une inscription dans la durée.

Nous sommes dans une aventure de transformation sociale sur une thématique singulière mais avec une visée politique forte (transformation radicale des modèles agricoles et alimentaires). C’est donc un effort considérable, qui n’est pas facile à porter. La structure se place dans des rapports de force qui ne nous sont pas forcément favorables, dans une précarité de moyens matériels et humains. Il nous faut changer de monture. Cela fait partie d’une crise de croissance, ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Il nous faut d’autres moyens.

Nous ne pouvons plus être seuls à porter ces thématiques là, il faut renforcer l’émergence de dynamiques locales, dans toute leur diversité. Nous sommes dans de la transmission de savoir, le colportage de communs, nous sommes des passeurs, et l’essaimage se fait de manière organique. Nous avons testé des dizaines de modalités d’essaimage. Mais cette diversité dans notre essaimage n’a pas encore atteint un degré d’autonomie suffisant. Par exemple, le nombre de paysans qui se rendent dans des centres de formation pour transmettre le projet de l’Atelier Paysan augmente de plus en plus. Mais les gens qui reçoivent le discours se tournent ensuite vers l’Atelier Paysan, et on ne peut pas dire que c’est satisfaisant si la responsabilité de l’accompagnement se concentre sur nos seules épaules.

Nous avons donc trois pistes majeures de consolidation de notre structure pour le long terme :

  • travailler au renforcement de notre essaimage et mieux mettre en mots ce que signifie essaimage, créer des conditions d’animations locales (visites chez des paysans par exemple) avec l’Atelier Paysan en soutien mais pas en intervention ;
  • Repenser notre modèle de formation continue, et former les futurs accompagnants locaux avec un cycle complet, dont les contenus seraient apportés par nous et par nos partenaires. Cela pourrait passer par la mise en place d’une formation diplômante sur plusieurs mois.
  • Faire émerger un centre l’Atelier Paysan qui nous permette de nous bénéficier d’un outil de travail raisonnablement adapté à nos besoins logistiques et stratégiques.

Au niveau du financement, nous sommes toujours en progression. Nous arrivons à trouver des moyens qui nous cantonnent à la frugalité. Car il y a une constante : pour rentrer 100, il faut travailler 130 ou 140. Le financement de nos travaux d’intérêt général est structurellement déficitaire, et ne résiste que par le fait qu’il y a des hommes et des femmes qui s’investissent plus que la moyenne dans l’aventure. Sinon, on n’existerait pas.

Dans l’immédiat nous avons intégré de nouveaux bureaux, mis en place de nouveaux locaux techniques, créé deux postes de coordination et nous avons des perspectives de renfort avec profils très expérimentés.

La dimension collective du portage d’un projet politique est importante. A plus d’épaules on va plus loin. Cela fait 3 ans que nous nous investissons dans le Pôle Inpact national (collectif composé de dix des principales structures qui pensent la question agricole et alimentaire autrement au niveau national).

Le projet USAGES : pour faire émerger des communs issus d’innovations ascendantes

Le Réseau Rural Français (il en existe dans chaque pays d’Europe) animé par le Ministère de l’Agriculture et le Commissariat Général à l’Egalité des Territoires a lancé en 2015 un appel à propositions intitulé “Mobilisation Collective pour le Développement Rural” afin de stimuler l’émergence d’initiatives collectives. Nous y avons répondu pour faire plus et mieux que ce que nous faisions jusqu’à présent, pour faire émerger des communs issus d’innovations ascendantes, avec une implication intense des paysans dans ces technologies.

Le projet s’est construit sur quatre axes :

  • renforcer les travaux de recherche et développement et de recensement des innovations qui existent déjà, accompagner des groupes pour la conception de machines pour lesquelles ils ont un besoin d’accompagnement.
  • diffusion : production des livrables issus de la partie R&D : tutoriels, chroniques d’innovations paysannes, documents thématiques (auto-construction de bâtiments en grumes, transformation à la ferme et technologies appropriées, ergonomie et technologies appropriées, gestion des couverts), exposition “Machines et bâtis agricoles, des communs en exposition” (120 planches disponibles version imprimée en prêt ou accessibles en ligne qui présentent la démarche, le projet politique et une centaine de bâtiments).
  • analyse : s’associer avec des acteurs de la recherche académique pour venir analyser la réalité de nos travaux, d’un point de vue sociologie, économie, efficacité collective. Nous avons beaucoup affiné les questions de recherche et avancé dans les prises de contacts pour traiter cet impensé scientifique. Un collectif de chercheurs va se lancer à l’automne prochain dans un gros programme de recherche autour de la question de l’économie de la machine agricole de 1945 à aujourd’hui, avec pour objectif de décortiquer les tenants de l’élaboration  des politiques publiques, les histoires des développements technologiques à marche forcée, etc…
  • décloisonnement : beaucoup de dynamiques rurales et agricoles relèvent de ce type d’approche ascendante, nous souhaitions recenser les citoyens qui se penchent sur ces problématiques. Notre projet politique est global.

Un des nombreux thèmes que nous avons abordé via ce projet est celui de la transformation alimentaire. Celle-ci est aujourd’hui massivement industrialisée. Notre agro-industrie, basée sur une agriculture de flux, a centralisé la transformation alimentaire dans des usines. Progressivement, les technologies ont été adaptées à la transformation industrielle. Cela a entraîné un assèchement de la diversité des technologies de transformation à la ferme. Or cette transformation à la ferme est un enjeu important : celui de contribuer à un rapatriement de la valeur ajoutée sur les fermes, quand une partie significative des paysans en France vit sous le seuil de pauvreté. Une grande part de la richesse y compris gustative, organoleptique a disparu au profit de ces usines qui ont concentré les outils de production. De plus, les normes de production, d’hygiène ont été conçues et mises en place pour et par le monde industriel. Il y a un vaste enjeu à faire en sorte que les paysans puissent disposer à nouveau d’une gamme technologique simple, accessible d’un point de vue conception, et dont l’utilisation fait appel à un haut niveau de savoir-faire, au sensible, à l’expérience. Mieux vaut des cerveaux que des serveurs.

L’Atelier Paysan : un réseau qui se développe dans d’autres pays

  • En France (y compris l’Outre-Mer)

Un collègue est parti ce matin en Guyane pour donner une première formation aux techniques de l’auto-construction (une semaine), puis tester et permettre de s’approprier les concepts aux champs (essais, réglages, etc) pendant une deuxième semaine.

Il y a également des perspectives à la Martinique, en Guadeloupe, à la Réunion, la question agricole étant très importante dans les DROM, et particulièrement des technologies paysannes appropriées, d’autant plus avec l’éloignement territorial.

Nous testons avec ces expérimentations si le modèle est applicable dans d’autres contextes. Pour cela, il y a un gros temps de préparation, puis une transmission de savoir-faire et savoir-être. C’est un galop d’essai pour le moment. Nous mettrons en main des groupes de paysans des technologies qui sont modifiables, y compris sur le terrain durant la 2ème semaine. Ensuite nous ferons le point.

Nous n’allons pas là-bas au hasard. Ces structures nous ont contacté. Les propositions technologiques qui leur sont actuellement accessibles ne sont pas adaptées aux besoins locaux et ne sont que prétexte à l’import-export de machines qui ne leur servent à rien.

  • Dans le reste du monde

Au Québec : c’est notre essaimage à l’international qui a été le plus efficace. Nous avons donné une formation, et depuis ils font chaque année des formations avec des supports produits localement. Des producteurs se sont réunis pour faire de la R&D à la ferme. En y allant, nous avons contribué à faire en sorte que ce soit une démarche qui s’autonomise, ils n’ont plus besoin de nous. Ils ont été force de proposition, et un certain nombre des variantes technologiques qu’ils ont créées nous ont inspirés ici. Ca a bien marché parce qu’on est allé là-bas juste avec nos plans (convertis au système impérial d’unités). Ils se sont chargés de trouver un local et la mise en place des conditions logistiques pour que ça puisse avancer. Cette configuration est idéale : on y va une fois, et l’autonomie se met en place naturellement, à la sauce locale.

En Europe, et au-delà (Afrique) : nous sommes sollicités de plus en plus souvent, à tel point que nous en avons tiré la conclusion que nous sommes mal à l’aise avec l’idée de nous rendre dans ces pays avec une approche “développementiste”. Les technologies appropriées, il faut les voir et entendre un témoignage là où elles sont mises en oeuvre. Donc le préalable à nos déplacements à l’étranger est maintenant que les demandeurs viennent ici en France pour découvrir ce que nous faisons, puis c’est à eux d’imaginer les conditions de notre intervention sur place, ou d’une reproduction autonome et adaptée localement. Toute cette logistique nécessaire au développement de la pratique, si elle n’est pas directement prise en main, élaborée localement,  ne peut durablement émerger.

Deux membres d’un collectif grec sont venus l’hiver dernier pour une visite et un stage d’auto-construction, afin de vivre notre approche. Ils ont le projet d’investir dans un centre localement, adapté à leurs problématiques.

Des projets pour le futur

Comme évoqué dans la première partie de cet entretien, nous avons pris conscience collectivement de nos limites et l’objectif est de mener à bien notre changement de monture (essaimage et mise en place d’animations locales, formations plus autonomisantes, faire émerger un centre adapté à nos besoins logistiques et stratégiques) pour créer les conditions de la durabilité et la soutenabilité de notre projet.

Bien sûr, nous souhaitons que des personnalités politiques sensibles à nos travaux s’en emparent en respectant la singularité de notre approche. Mais il nous faudrait des relais qui ne soient pas dans la récupération et les apparences. C’est un gros travail que nous n’avons pas le temps de faire pour le moment.

Nous souhaitons également diversifier nos explorations en termes de thématiques de travaux comme par exemple la transformation alimentaire où nous avons intensifié nos travaux depuis six mois à un an.

Plus d’un millier de bâtiments/technologies/machines sont recensés et partagés sur notre site internet et dans notre forum. Sur cet aspect documentaire, encyclopédique, la stratégie logique est d’aller de plus en plus vers une complétude sur le plan technologique de l’ensemble des systèmes de production. Exemple : brasserie paysanne, boulange paysanne (avec des documents complets pour accompagner le cheminement des projets de A à Z). L’idée est de développer une cohérence et une autonomie des communautés paysannes sur l’ensemble des processus techniques, technologiques. Il est dommage par exemple de produire du blé de qualité puis de l’envoyer dans une minoterie où il sera mélangé avec d’autres grains industriels.

Nous voulons aussi participer à faire émerger une véritable contre-expertise paysanne, critique des technologies agricoles. C’est un des enjeux du programme de recherche qui sera lancé à l’automne prochain autour de la vaste question de l’Économie de la machine agricole en France. Ce travail passera par la mise en place de travaux d’enquête de paysans citoyens pour comprendre les déterminismes des choix en matière d’agro-équipements.

Dans les prochains mois, nous développerons une méthodologie d’accompagnement à la restructuration des friches agro-industrielles. Il y a un gros phénomène de renouvellement des populations paysannes, avec de nombreuses personnes qui ont envie de s’investir, et partant de l’existant, reprennent les grandes infrastructures agricoles désormais anachroniques pour en faire autre chose.

Nous allons travailler notre capacité d’accompagnement sur ce point précis, y compris pour accompagner des paysans qui sont en difficulté parce qu’ils subissent un fonctionnement qui leur a été imposé. Une part significative des populations paysannes vivent en dessous du seuil de pauvreté. En changeant de modèle, en re-configurant une ferme, il existe une chance de se restructurer et de repartir du bon pied en s’affranchissant du système en place. Nous devons accompagner ces personnes dans la difficulté ayant la possibilité de se projeter sur autre chose : c’est ce que nous appelons l’auto-reconfiguration accompagnée.

Le modèle contemporain tue le tissu social paysan. Dans le cas des paysans qui lâchent l’affaire, leur système n’est pas reprenable en l’état, et la vaste majorité des terres agricoles part à l’agrandissement. Les modes de production agro-industriels ne correspondent plus aux aspirations d’aujourd’hui, ne constituent plus un horizon désirable. Cette reconfiguration / transition n’a pas été pensée et il y a peu de capacité d’accompagnement. S’il y avait quatre ou cinq fois plus de travail agricole en France, ça ne serait pas grave, au contraire…

Propos recueillis par Maïa Dereva

Photo L’Atelier Paysan sous licence CC BY-NC-SA 2.0