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Permaéconomie

Emmanuel Delannoy

Collection « Le monde qui vient »
Editions Wildproject (Octobre 2016)

permaeconomieEncore masquée par le fracas du vieux monde, une révolution économique est en cours. Fondée sur une nouvelle relation au vivant, inspirée de la permaculture, la permaéconomie entretient la richesse de la biosphère, ce socle fondamental de toute prospérité.

Or dans son fonctionnement actuel, notre économie ne semble plus capable de créer la prospérité partagée qu’on est en droit d’attendre d’elle. La confiance n’y est plus. À qui la faute ? S’il y a bien sûr les excès d’un capitalisme « hors sol », financiarisé à outrance, il y a aussi la majorité silencieuse qui laisse faire, dépassée par un système dont les rouages lui échappent.

Chercher à comprendre, c’est déjà désobéir. Entreprendre autrement, produire autrement, consommer autrement, c’est déjà résister. De nouveaux modèles révolutionnaires sont déjà à l’oeuvre : économie circulaire, économie de la fonctionnalité, biomimétisme…

La permaéconomie est le nouveau paradigme qui permet de les mettre en cohérence. Emmanuel Delannoy en présente ici les principes et ses premières réalisations, pour les citoyens, les entrepreneurs, et les décideurs.

Sommaire :

Introduction

I. Tout est là : la prochaine révolution industrielle a déjà commencé

Sortir des sentiers battus
Coopérer plus, coopérer mieux
Innover… dans la manière d’innover
Ressources, précieuses ressources
Une économie qui réinvestit dans le capital naturel
La question de l’emploi

II. La vraie nature des changements en cours
Quand notre histoire rencontre celle du vivant
La révolution industrielle, et ses héritages
Retour aux fondamentaux
Ce que nous dit le vivant sur notre économie
Coopérations et symbioses
Crise, quelle crise ?
L’exaptation, l’accélérateur de transition

III. La permaéconomie, ou l’économie au service de la vie
Une économie circulaire, inspirée par le vivant
Changer d’échelle
De la quête de maîtrise à une nouvelle alliance avec le vivant
Un cadre pour la vision… et l’action
Une chance à saisir

Annexes

Pierre Thomé : quel avenir pour les communs ?

Entretien avec Pierre Thomé, auteur de l’ouvrage (Biens) Communs : quel avenir ? Un enjeu stratégique pour l’ESS

Maïa (P2P Foundation) : pouvez-vous nous dire par quel parcours vous êtes passé pour aboutir à la rédaction de ce livre ?

Pierre : Je suis retraité depuis 2003 et je dispose ainsi de pas mal de temps libre et d’un « revenu de base » suffisant. J’ai passé toute ma carrière dans le domaine de l’action sociale, en particulier la protection de l’enfance, en commençant comme éducateur spécialisé et en finissant comme chercheur auprès du Conseil général du Rhône.

Une fois en retraite, ma réflexion s’est orientée vers des thèmes qui m’étaient chers dans les années 1970, et notamment celui de l’autogestion qui s’est développé en France et en Europe à cette époque. Après mai 68, je me suis investi dans la mouvance autogestionnaire. C’était le début de la désindustrialisation en France, l’affaire de l’usine horlogère Lip à Besançon est sans doute la première grande lutte contre cet état de fait, elle en est devenue un symbole. A cette époque, la tentative de redémarrage de l’usine a représenté une menace pour le pouvoir politique qui a tout fait pour empêcher cette relance.

C’est aussi l’époque du projet d’extension d’un camp militaire sur le plateau du Larzac dans les Cévennes. L’armée avait commencé à s’emparer de pâturages et 103 paysans ont créé ce que je qualifierais aujourd’hui de « commun » (ça ne portait pas ce nom là à l’époque). Cette décision fut accompagnée par un vaste mouvement populaire qui a généré de grands rassemblements sur le plateau allant jusqu’à plus de 100 000 personnes. Cette lutte a abouti en mai 1981 à la décision de François Mitterrand, fraîchement élu président de la République, de stopper le projet. 6 000 hectares ayant déjà été réquisitionnés, de longues discussions avec le Ministère de l’Armée et celui de l’Agriculture ont permis de signer un bail emphytéotique de 99 ans et de créer le premier office foncier agricole en France : la Société civile des terres du Larzac. Les terres sont gérées depuis de manière collective et des locations sont proposées à des agriculteurs. José Bové, qui possède une exploitation sur place, fut une des figures emblématiques de cet épisode. Selon lui :

Il n’y a pas besoin d’être propriétaire du foncier pour aimer la terre et bien la cultiver.

C’est à cette époque que j’ai rejoint le Parti Socialiste Unifié (PSU) dans lequel se trouvait par exemple Michel Rocard (jusqu’en 1974). Pour la gauche socialiste, le PSU était un laboratoire d’idées s’appuyant sur des actions collectives locales (loyers, charges locatives, équipements socio-culturels…) dans de grands ensembles en plein développement (Sarcelles, Grenoble, Villejean à Rennes…). J’ai été très investi dans des projets touchant à la vie de la cité (école, achats collectifs, centres sociaux…).

Une fois en retraite, j’ai retrouvé d’anciennes relations de ce parti. Nous nous sommes demandés pourquoi l’idée d’autogestion avait pratiquement disparu des écrans politiques de la gauche de gouvernance. Nous avons alors décidé de chercher s’il en restait quelques traces, ce qui nous a rapidement conduits vers l’Économie Sociale et Solidaire fondée sur : la vie associative et la vie coopérative, le fonctionnement démocratique avec le moins de hiérarchie possible et la volonté de travailler autrement.

C’est ainsi que, par exemple, j’ai découvert Ardelaine en Ardèche, une aventure démarrée dans les années 1980 par cinq personnes qui ont racheté une filature à moitié en ruine et qui ont recréé toute la chaîne de la laine, de la tonte à la fabrication de vêtements et de literie. Aujourd’hui cette coopérative compte 50 salariés (plus de la moitié sont coopérateurs) et a relancé l’économie et la vie sociale d’un village de 500 habitants avec des ateliers de fabrication, un musée de la laine (20 000 visiteurs par an), un café-librairie et un restaurant, en quelque sorte une multiplication de communs !

Tout cela a conduit à l’écriture de Créateurs d’utopies. Démocratie, autogestion, économie sociale et solidaire (éditions Yves Michel) livre à la fois historique et d’actualité car illustré par de nombreux exemples d’associations et de Scop dont certaines se réfèrent encore à l’autogestion.

Ce n’est qu’un peu plus tard que j’ai découvert la notion de « communs », grâce à Elinor Ostrom lorsqu’elle a reçu le Prix Nobel d’économie en 2009, et j’ai lu le seul livre traduit en français de cette économiste américaine : La gouvernance des biens communs. En lisant cet ouvrage, Michel Rocard a d’ailleurs déclaré :

le prix Nobel pour l’autogestion ! Vous avez bien lu… 
(Libération 20/10/2009)

Je me suis donc mis passionnément à étudier la question… et je viens de publier (Biens) Communs : quel avenir ? Un enjeu stratégique pour l’économie sociale et solidaire (éd. Yves Michel)

Maïa : quels sont les objectifs de ce nouvel ouvrage ?

Pierre : à titre personnel, je suis investi comme sociétaire dans différentes coopératives (Enercoop, Terre de Liens, Ardelaine, la NEF,…). J’agis dans ce cadre pour faire de la sensibilisation et soutenir le développement de ces formes d’organisations. C’est un travail de longue haleine dont je ne verrai sans doute pas le bout, à supposer qu’il y en ait un ! Mon livre s’inscrit dans cette démarche.

Lors du récent Festival du livre à Mouans-Sartoux, j’ai constaté que le concept « (bien) commun » est encore assez étranger. J’ai notamment participé à une table ronde avec Cyril Dion, réalisateur du film “Demain, qui évoque beaucoup d’expériences alternatives sans jamais prononcer le mot « commun ». Des pratiques existent mais ne sont pas encore assez associées à ce concept, alors qu’il s’agirait de les relier pour en dégager du sens, y compris politique.

Lorsque je définis les communs, j’écarte le mot « bien » pour éviter toute confusion avec une idéologie. Par exemple, l’eau est souvent considérée comme un « bien commun universel » mais il s’agit d’une déclaration de principe très loin de la réalité tant l’eau peut faire l’objet d’un manque pour un grand nombre d’habitants de la planète et de conflits y compris militaires. Ce qui m’intéresse, c’est comment les gens peuvent s’organiser pour s’emparer de ces questions. Pour moi, un commun est une construction sociale et non un bien naturel qui irait de soi. Ce sont des personnes qui se réunissent autour d’une ressource et qui cherchent à en déterminer des droits collectifs (accès, usages, protection…) qui peuvent être contraignants et en tenant compte bien sûr des aspects réglementaires venant des acteurs publics (État et collectivités territoriales). Pour s’instituer, ces communs, la plupart du temps, se rapprochent de l’Économie Sociale et Solidaire, associations et coopératives. Et il n’est pas nécessaire de toujours rechercher des exemples extraordinaires pour les découvrir. Ainsi dans le livre, je présente les droits d’usage d’un pâturage communal situé en Savoie qui illustre très bien la notion de « consortage » (un mot utilisé en Suisse pour évoquer le fait de « partager le même sort »). Pour moi, ce mot est une excellente définition des communs :

c’est la nécessité qui fait se réunir des personnes autour d’une ressource à utiliser en commun tout en la préservant.

Dans le cas présent, il s’agissait de sauver la vie économique d’un village alors que les fermes ne trouvaient plus de repreneurs. Les huit fondateurs sont tous des fils de paysans du village qui ne se destinaient pas forcément à l’élevage. Ils évitent d’ailleurs soigneusement les questions idéologiques qui pourraient créer des conflits. Ce qui les rassemble, c’est le sauvetage du pastoralisme en montagne et ils ne voient pas d’autre solution que de “consorter”, c’est-à-dire créer des communs. Leur action est ainsi à l’origine de quatre coopératives, une association et une petite mutuelle (caisse de solidarité en cas de perte accidentelle d’une vache). Toute leur production de lait sert directement à la fabrication sur place du fruit commun : l’excellent fromage de Beaufort.

Un autre aspect important de cette expérience, c’est l’ancrage local, avec une forte territorialisation des actions. L’exemple alpin pourrait ainsi se multiplier dans tous les endroits qui ne sont pas encore trop atteints par les enclosures des fermes usines. L’un des enjeux a été de remédier à la dispersion des terres en herbage par un remembrement volontaire. Dans le village c’est un Groupement agricole d’exploitation en commun (GAEC), qui est apparu comme la structure juridique la plus adaptée à cette mise en commun ; elle regroupe actuellement huit paysans-éleveurs pour un troupeau de 120 vaches laitières. L’alpage d’été reçoit aussi d’autres éleveurs et c’est un Groupement pastoral (coopérative) qui en assure la gouvernance.

Mon livre a donc pour principal objectif de faire connaître ces exemples au grand public afin de le sensibiliser à cette question des communs – ce qui est loin d’être acquis ! – avec le projet de créer une société plus juste, plus égalitaire et plus responsable de son environnement. Bien sûr, ce projet n’est pas nouveau et a déjà échoué à plusieurs reprises au cours des siècles précédents. Ma réserve se situe sans doute là : est-ce que l’on rêve ? Pourtant à l’âge “canonique” qui est le mien, je souhaite encore de tout cœur un changement politique radical et je crois qu’il est possible, à partir de l’enseignement des communs, de construire un nouveau système économique, sociale et écologique, c’est certainement un travail de longue haleine, mais je pense que l’on a bien besoin d’un récit politique capable de proposer autre chose qu’une économie financière dominant le monde en le détruisant. (Cf. Communs et ESS peuvent-ils faire système ?)

Rétributions contributives : une exploration des financements dans les communs

Catalyst est un laboratoire citoyen en innovation sociale à l’ère du numérique.  Il est ouvert à tous et se situe sur Lille et dans les alentours de Lille. Ce laboratoire vise à mieux comprendre les nouveaux sujets émergents à l’ère du numérique et à favoriser leur appropriation par tous. Dans les dernières années, Catalyst a ainsi favorisé l’émergence sur Lille et ses environs des sujets de consommation collaborative, de tiers-lieux, du mouvement des makers, des communs. Il a notamment soutenu l’émergence de l’Assemblée des Communs de Lille.

Depuis quelques mois, le collectif s’intéresse aux nouveaux modes de rétributions financières. Beaucoup de collectifs sont confrontés à des enjeux similaires autour des questions : Comment vivre de ses contributions ? Comment se répartir l’argent de manière saine, transparente et juste ? Des pistes de réflexions/actions sont en cours d’expérimentation partout dans le monde.

Le 16 septembre dernier, une journée de réflexion et de partage autour de ces questions s’est tenue à Lille. Cette journée faisait suite à celles des 23 et 24 mai 2016 durant lesquelles plusieurs outils ont été présentés (Liberapay, Co-budget, Gratipay). Des intervenants sont également venus partager leurs pratiques, comme Ploum qui pratique le prix libre, ou encore Open Collective qui permet aux groupes de rapidement mettre en place un collectif, de recueillir des fonds et de les gérer de manière transparente.

Cette seconde journée à laquelle a participé une trentaine de personnes fut donc l’occasion de faire un retour sur les expérimentations et les mises en pratique.

Retour d’expériences autour des utilisateurs de Liberapay

Les membres du collectif Catalyst ont expérimenté concrètement l’utilisation de Liberapay en injectant une somme hebdomadaire dans l’outil. Chaque contributeur pouvait ensuite se servir librement dans ce pot commun, avec les limites imposées par l’outil lui-même qui empêche d’augmenter trop vite son revenu. Ainsi, les contributeurs ont décidé eux-mêmes de leur rétribution de manière transparente. Après quelques mois, un bilan a été fait, dont il ressort les éléments principaux suivants :

  • A ce stade, le nombre d’utilisateurs de l’outil n’est pas suffisant, ce qui provoque beaucoup de flux croisés (A donne à B qui donne à C qui donne à A). Il y a quasiment autant d’équipes que d’utilisateurs, ce qui ne permet pas encore de développer une véritable économie.
  • Selon la personnalité de l’utilisateur, il n’est pas toujours simple de s’autoriser à se servir dans le pot commun. Il y a un blocage psychologique à dépasser pour démarrer, ce qui peut se faire par la mise en place d’un cercle de confiance où le dialogue est au centre. Ainsi, chacun peut expliquer clairement pourquoi il prend le montant choisi. Il s’agit de se demander : quelles règles du jeu se fixe la communauté ? On voit donc toute l’importance d’accompagner l’outil avec une véritable gouvernance.
  • Ce type d’outil incite à dé-corréler la valeur horaire de l’investissement que l’on peut avoir. Ainsi, pour une mission précise, on ne peut pas forcément être rétribué ponctuellement puisque le principe est de proposer un paiement hebdomadaire récurrent. Il s’agit de sortir complètement de l’idée de salariat ou de bénévolat et de passer à une logique de contribution qui est différente de la logique de prestation ou de celle de salariat. Cela remet donc en question la définition du travail.
  • A ce stade, seules de petites sommes transitent par l’outil, mais l’on se pose forcément la question du statut fiscal si cette pratique devait se développer, statut qui à ce jour reste encore assez flou même si des réflexions sont en cours (émission de factures, etc…)

A l’écoute des témoignages, un certain nombre de réserves ont été émises par les participants :

  • les montants distribués valent-ils ce que vous produisez par la communauté ? (il y a un risque que l’investissement soit bien supérieur au montant de la rétribution)
  • la valeur que l’on donne à l’argent se reproduit dans ce genre d’expérience (il existe de grosses différences individuelles d’estimation des coûts des services)
  • chacun choisit individuellement combien il se rémunère alors que la rémunération devrait être le fruit d’un dialogue social
  • dans Liberapay, les dons sont anonymes. Est-ce satisfaisant ? Ne faut-il pas plus de transparence ou au contraire  l’anonymat du don a-t-il des vertus ?

Globalement, il semble donc que chacun tend à ré-aligner cette proposition de modèle de rétribution sur le modèle qu’il connaît déjà. Pour expérimenter, le collectif propose de se départir de toutes les idées reçues, tout en acceptant à l’avance que la conclusion puisse être par exemple : « Finalement, le meilleur modèle c’est bien le salariat« .

Liberapay est un outil qui peut permettre certaines choses, mais il n’est certainement pas la solution unique à mettre en place. Dans beaucoup de domaines, nous sommes en train de passer d’un système simple à un système complexe (plusieurs métiers dans une vie, morcellement des activités et des pratiques). Il est donc probable que le modèle de rétribution sera un ensemble d’outils et de pratiques variés, par un exemple avec une complémentarité entre un revenu inconditionnel fixe et un revenu contributif variable.

Comment  mettre en place une réciprocité ?

Une autre question qui se pose régulièrement pour les contributeurs est la question de la réciprocité. En effet, le marché rattrape souvent les communs pour en faire des objets commerciaux. Comment faire pour inciter un acteur public ou privé qui utilise la ressource d’un commun à contribuer au développement de ce commun sans épuiser la ressource ? Paradoxalement, lorsque des organismes privés décident d’investir dans un commun, les contributeurs peuvent entrer dans une logique de prestation de service ce qui déstabilise la communauté, voire fait s’étioler rapidement le commun.

La journée a été l’occasion de découvrir plusieurs expériences et pistes de réflexions, parmi lesquelles :

  • le cas éloquent de « Pepper and Carrot« , une bande dessinée open-source qui a été publiée par un éditeur (Voir l’article de Calimaq) : la publication de l’ouvrage donne lieu à une réciprocité financière inhabituelle et sur une base volontaire de la part de l’éditeur. Il n’y a pas de pourcentage des ventes qui revient à l’auteur à chaque fois qu’une BD sera vendue par Glénat (rémunération proportionnelle). C’est une somme fixe qui ira tous les mois à l’auteur David Revoy, indépendante du volume des ventes. En outre, la publication a augmenté la visibilité de l’auteur, ce qui peut en soi être aussi considéré comme une rétribution.
  • les pistes de réflexion autour des licences à réciprocité (avec une présentation « Les licences à réciprocité, c’est quoi ?« ), notamment le travail réalisé autour de la Contributive Commons qui va au-delà d’une simple licence pour modéliser un ensemble d’outils articulés.
  • un exemple de contrat de réciprocité rédigé pour le Mutualab qui incite les utilisateurs du commun à se sentir contributeurs (même s’il n’y a pas d’échange monétaire).
  • La mise en place de véritables contrats commerciaux avec des organismes publics comme par exemple cette cartographie réalisée pour une collectivité locale à l’aide de la plateforme libre Communecter.

De manière générale, l’enjeu pour les communs semble de réussir à mettre en place une économie de la ressource  : il s’agit de réussir à centrer les réflexions sur la création et la pérennisation d’une ressource plutôt que sur une optimisation des flux financiers. La rétribution dépend alors de la valeur créée dans et par le commun. Il s’agit également de convaincre les acteurs, notamment publics, que, tout en s’assurant que le commun est utile aux citoyens, il s’avère plus productif de « lâcher du lest » quant à sa production c’est à dire de laisser faire la communauté des communs.

Une expérimentation permanente

Le collectif ouvert Catalyst a la particularité de fonctionner sur un mode pair-à-pair qui privilégie l’autonomie, les expérimentations concrètes, et une gouvernance auto-organisée (qui prend souvent la forme de la stigmergie).

Une des caractéristiques du collectif est donc de saisir les opportunités d’expérimenter à tout moment. Ainsi, cette journée de partages a aussi été l’occasion de mettre concrètement en place deux propositions :

  • un déjeuner contributif sous forme d’auberge espagnole : plutôt que de s’en tenir à l’habituel bénévolat qui prévaut pour les auberges espagnoles, un pot commun a été mis à disposition des participants qui n’avait pas amené à manger pour qu’ils puissent contribuer au repas réalisé par les volontaires. Ces volontaires ont pu ensuite se répartir la somme récoltée.
  • la mise en place d’une monnaie de substitution : les personnes n’ayant pas d’euros sur elles ont pu demander à la « banque » de leur donner des billets leur permettant de contribuer symboliquement au repas. Le collectif a pris en charge cette valeur mais il a permis aux participants de se sentir impliqués en faisant le geste de mettre leurs billets factices dans le pot commun. Il pourrait même être envisagé de troquer cette valeur contre des contributions d’autres natures.

Il convient ici de remercier particulièrement Marion Rousseaux et Simon Sarrazin qui ont été les chevilles ouvrières de cette journée réussie.

Ressources

L’illustration a été réalisée par Laurent Libessart qui a croqué avec beaucoup d’humour les interventions de la matinée.

En route vers une assemblée européenne des communs : l’unité et la politique autour du paradigme des communs

Le 26 Septembre, un groupe d’organismes sans but lucratif, de fondations et d’autres organisations de la société civile ont  publié conjointement un « Appel à une Assemblée européenne des communs« . Le document rédigé collectivement, qui continue de recueillir les signatures de groupes et d’individus à travers l’Europe, est la déclaration d’intention d’un réseau distribué de «commoners».

L’Assemblée cherche à unir les citoyens par une solidarité trans-locale et trans-européenne pour faire face aux défis actuels de l’Europe, afin de surmonter et relancer le processus politique pour le 21e siècle. Les communs peuvent être compris comme un paradigme de transition qui met l’accent sur la coopération dans la gestion des ressources, des connaissances, des outils et des espaces aussi divers que l’eau, Wikipedia, un crowdfunding, ou un jardin communautaire. Leur appel décrit le « faire en commun » comme :

…des initiatives ascendantes basées sur la coopération en réseau, déjà mises en pratique par des millions de personnes en Europe et dans le monde.
Ces initiatives créent des systèmes autogérés qui répondent à des besoins vitaux. Elles opèrent souvent en dehors de l’économie de marché dominante et des politiques publiques étatiques, tout en expérimentant de nouvelles structures hybrides.

L’Assemblée a émergé en mai via une communauté pilote diversifiée, respectant la parité, de 28 militants et militantes de 15 pays européens, travaillant dans différents domaines des communs. De nouvelles personnes se joignent à l’Assemblée chaque semaine, et la CEA est inclusive et ouverte à l’arrivée d’autres contributeurs, de sorte qu’un large mouvement européen résilient puisse émerger. Elle cherche à donner de la visibilité aux actes de mise en commun par les citoyens pour les citoyens, tout en favorisant l’interaction avec les politiques et les institutions aux niveaux national et européen.

La partie d’un mouvement plus large

L’adoption rapide des communs comme vision du monde holistique, alternative, durable et sociale est en partie l’expression d’un malaise avec le système économique actuel, injuste et démocratiquement carencé. Le mouvement des communs a explosé ces dernières années, suite à l’attribution du prix Nobel d’économie à Elinor Ostrom en 2009 pour son travail sur la gestion des ressources communes. Il a également vu la rencontre avec d’autres mouvements, comme la solidarité et l’économie du partage, les mouvements sociaux, la décroissance et la production pair à pair.

Michel Bauwens, membre de la CEA et figure de premier plan du mouvement peer-to-peer, explique :

Partout dans le monde, un nouveau mouvement social émerge, qui remet en cause les l’économie politique «extractive» dominante et qui co-construit les germes d’une société durable et solidaire. Commoners obtenez également une voix, par exemple, par les assemblées des communs qui émergent dans les villes françaises et ailleurs. Le temps est venu pour un renouvellement du monde politique, à travers une Assemblée européenne des communs.

L’appel comprend une invitation ouverte à Bruxelles du 15 au 17 Novembre 2016 pour trois jours d’activités et de réflexion partagées sur la façon de protéger et de promouvoir les  communs. Elle comprendra une session officielle au Parlement européen, organisée par l’Intergroupe sur les biens communs et services publics, le 16 Novembre (capacité limitée).

Vous pouvez lire et signer le texte intégral de l’appel, disponible en anglais, en français, en espagnol, et bientôt d’autres langues européennes, sur le site Web de la CEA. Il y a une option pour signer en tant qu’individu ou organisation.

Pour plus d’informations, visitez le site http://europeancommonsassembly.eu/ ou suivez le compte Twitter @CommonsAssembly pour des nouvelles régulières.

Contact Media : Nicole Leonard contact@europeancommonsassembly.eu

Article original en anglais

 

Photo : Till Gentzsch European Alternatives

Du peer-to-peer au salaire à vie : rencontre entre Bernard Friot et Michel Bauwens

Entre Peer to peer et salaire à vie, quelles convergences possibles pour un nouveau paradigme économique?

De la réappropriation de nos communs comme la caisse de sécurité sociale à l’autogestion de caisses de salaires et d’investissement par territoire en passant par la redéfinition du travail au sein des collectifs de production et l’absence de propriété lucrative qu’elle soit intellectuelle ou matérielle, des ponts existent entre ces 2 mondes que sont le peer to peer et le salaire à vie, et qui s’adressent souvent à des classes sociales différentes.

Quand deux écosystèmes révolutionnaires émanant de paradigmes de l’utopie concrète se rencontrent : quel champs des possibles ? La révolution numérique et les mutations qu’elle engendre notamment en terme de modèle de production et nouveau travailleur, est-elle compatible avec le salaire à vie ?

Ce sont toutes ces questions qui ont été abordées lors de cette rencontre entre ces 2 grands théoriciens. La rencontre (visible dans la vidéo ci-dessus) a permis de souligner les convergences possibles entre les deux modèles au cours d’un échange chaleureux.

Cette séquence libre et ouverte s’est appuyée plus particulièrement sur deux de leurs ouvrages respectifs : « Emanciper le travail » et « Sauver le monde – Vers une économie post-capitaliste avec le peer-to-peer« .

Informations pratiques :

Lundi 26 septembre de 19:30 à 22:00
Le Lieu-Dit
6 Rue Sorbier, 75020 Paris
Entrée libre, consommations sur place
Evénement Facebook

La Coop des Communs : Construire des alliances entre Economie sociale et Communs

coopdescommuns-logoLa Coop des Communs réunit des activistes du monde des communs, des militants, des chercheurs, des entrepreneurs de l’économie sociale et solidaire (ESS) ainsi que des acteurs publics. Nous voulons contribuer à la construction d’un écosystème favorable à l’éclosion de communs co-construits avec l’ESS ainsi que les pouvoirs publics intéressés.

La Coop des Communs croit à la légitimité et la pertinence des formes de solidarité, de réciprocité, de propriété et de gouvernance collectives « en communs » pour répondre aux défis des transformations technologiques, démographiques, écologiques, dans le monde du travail et dans la mondialisation.

Alliés, Communs et ESS peuvent former, non des solutions résiduelles, mais de véritables piliers d’un développement soutenable dans une vision plurielle de l’économie.

La Coop des Communs est une association de personnes physiques, soutenue par des personnes morales engagées. Elle développe des alliances concrètes entre ESS et communs pour :

  • alimenter la recherche et les échanges sur les domaines dans lesquels les communs peuvent et doivent se déployer, et sur les modalités le permettant,
  • promouvoir des laboratoires citoyens et économiques dans des domaines comme l’économie collaborative, la santé, l’éducation, la transition énergétique, le domaine foncier, la ville, la finance,
  • montrer qu’on peut utiliser des logiques de communs pour fournir des services d’intérêt général sur une base démocratique et élargir les choix dans les partenariats publics/privés/communs.

Pour cela, La Coop des Communs impulse ou déploie :

  • des travaux d’étude et de recherche donnant lieu à publication,
  • des recherches-actions avec la construction de projets concrets avec les acteurs,
  • des séminaires ou conférences,
  • des formations, des bases de ressources documentaires pour documenter les pratiques.

Elle construit des propositions pour les politiques publiques.

Son action est ancrée dans le cadre français. Elle échange beaucoup avec les pratiques équivalentes dans d’autres pays et contribue à l’émergence de propositions à l’échelle mondiale.

La Coop des communs a été créée à l’initiative de Nicole Alix, Jean-Louis Bancel, Benjamin Coriat et Frédéric Sultan. Elle est ouverte à tous ceux qui sont persuadés que les alliances entre communs et ESS vont favoriser le développement d’une économie fondée sur la réciprocité.

La Coop des Communs se veut un centre de ressources pour tous ses membres, en souhaitant que ceux-ci puissent puiser dans l’association des idées et des moyens pour développer des projets, qui pourraient en quelque sorte être « incubés » dans La Coop. Vous pouvez y adhérer et contribuer aux travaux.

La Coop des Communs anime et modère une liste mail ESS-Communs. Celle-ci permet le débat sur l’actualité de l’ESS et des communs. Elle se fait l’écho des travaux de l’association.  Pour faire partie de la liste ESS-Communs, merci d’adresser un mail à [email protected]

ÉVÉNEMENT
L’Assemblée Générale de lancement de l’association aura lieu le 8 novembre prochain à partir de 16h30 à la MGEN,

3 square Max Hymans – Paris 15ème.

Salle Atlantique